Dans une nuit onirique, des objets, qu’on pensait laissés pour compte, promis au rebut, prennent peu à peu vie.
Ils s’éveillent, animés par les flux d’air soufflés dans leurs bronches, tanguent, craquent, bougent, respirent, sifflent, éructent, vrombissent… et donnent à entendre un univers sonore où se mêlent abstraction, évocations, rythmes naturalistes, archaïques ou complexes…
Il est tentant de jouer avec eux. Laurent Bigot construit une musique en leur compagnie. Cependant, ils sont partenaires malins et imprévisibles.
D’un air instable se situe quelque part entre l’instrument à vent, le dispositif sonore et un théâtre d’objet sans histoire. Des bouteilles de verre, de plastique, des canettes en métal, des baudruches, des tuyaux. Deux petits compresseurs, quelques micros. Une table de mixage avec 24 petits robinets en guise de potentiomètres.
« « Rien ne se perd », pourrait nous susurrer à l’oreille cet incroyable dispositif onirique. Dans l’antre d’une nuit obscure, le banal du quotidien mis au rebut reprend forme, vie, énergie.
Laurent Bigot nous fait pénétrer dans son intimité, nous rassemble autour de sa table d’architecte du mouvement et des sons et nous ouvre grand la porte des rêves, adultes et enfants. Il pilote les objets, dompte l’air, crée son manège à la manière d’un mini son et lumière en mouvement. Il faut dire que le musicien-poète a plus d’un tour dans son sac pour réveiller les consciences tout en douceur.
Avec D’un air instable, il se joue de l’incroyable rencontre des matières physiques, rendues sonores et nous livre une poésie en prise avec les thèmes très actuels de l’écologie et du changement climatique. Ici, point de leçon. C’est la convocation de tous les imaginaires qui prime, la reconnexion des yeux et des oreilles et la grande liberté de composer, chacun, ses propres représentations. »
Camel Zekri, pour le festival Les Instants Fertiles.